Placée sous le thème « Minorités linguistiques/culturelles et éducation en contexte multilingue », l’objet de cette école doctorale est de former les jeunes à comprendre la gestion des minorités ethnolinguistiques dans les communautés, principalement africaines. Il va de soi que les contextes multilingues entrainent directement des contextes multiculturels, ce qui exige une politique de gestion positive et inclusive. Dans le cas contraire, certaines langues appartenant à des contextes particuliers seront à l’écart, entrainant ainsi l’appauvrissement du répertoire culturel d’un espace donné. Or quand on construit une nation, une région, une ville, on ne doit pas exclure ces langues, au risque d’exclure automatiquement des faits culturels. Le déséquilibre qui s’installe de ce fait peut être à l’origine des revendications, d’un désintérêt et même d’un antipatriotisme. La méconnaissance donc des langues minoritaires ou même des langues nationales qui opèrent aux côtés du français et de l’anglais génère souvent un sentiment d’abandon.
Julia Ndibnu-Messina, Professeur titulaire à l’Ecole normale supérieure de Yaoundé, présidente de l’ACETELACH
« les jeunes chercheurs conviés à cette école sauront désormais comment mener des enquêtes aussi bien sur le plan du droit que sur celui de la didactique des langues, de la sociologie ou de l’histoire, pour qu’ils puissent détecter les distances entre les langues et les distances entre les cultures, les combinaisons pour que les langues soient revalorisées et par ricochet que la minorité soit reconnue et que s’installe une forme d’observatoire des pratiques linguistiques et une amélioration de la vision de soi en tant que personne appartenant au Cameroun, non en tant que francophone ou anglophone mais en tant que camerounais se revendiquant d’une langue et parlant d’autres langues. Ainsi les minorités vont être promues et les jeunes chercheurs pourront hériter de cette vision entre les langues dominantes et les langues dites dominées dont certaines personnes veulent souvent continuer à garder la domination pour assouvir un certain pouvoir ».
Une formation transdisciplinaire qui a donné lieu d’aborder les questions liées à la linguistique appliquée à l’exemple de la diplomatie linguistique avec des interrogations sur la didactique de langues, le côté artistique est également intervenu avec la présentation de la fonction du compteur professionnel par un artiste. L’aspect juridique concernant le droit linguistique et le droit des minorités n’était en reste. La partie la plus importante de cette rencontre portait sur le renforcement des capacités rédactionnelles des articles scientifiques via la collaboration et la co-construction des articles dans le domaine des minorités ethnolinguistiques. La cerise sur le gâteau c’est le prix décerné au meilleur article rédigé, avec un accent sur le respect des principes scientifiques, l’introduction de la gestion des minorités et la proposition des résultats exploitables par la société.
Pr Gabriel Mba, Chef de département des Langues et Cultures camerounaise à l’École normale supérieure de Yaoundé, membre de l’ACETELACH
« Lorsqu’on traite des langues, l’on considère le plus souvent les langues majeures, en n’oubliant qu’on peut avoir des attitudes négatives de la part des minorités ethnolinguistiques. Si vous voulez asseoir une politique inclusive vous devez travailler avec toutes les langues qu’elles soient majeures ou mineures. Nous avons des étudiants qui vont faire des thèses de doctorat ou des mémoires de master, il faudrait qu’on les affûte dans la compréhension de ces problèmes de minorités ethnolinguistiques, qu’on les assiste dans les sujets de thèse qu’ils ont choisis parce que nous faisons une école doctorale avec une thématique, mais nous allons en multiplier au fil des années et des sessions. Nous mettons donc du jus scientifique en ces doctorants pour leur permettre de planter des travaux qui ont un caractère scientifique avéré. Sur le thème que j’ai abordé ce matin concernant la diplomatie et le multilinguisme, il y a un réel problème. Vous voyez quand on parle de diplomatie, on ne voit que les affaires extérieures d’un Etat, on ne lie pas diplomatie et multilinguisme, or la diplomatie se déroule dans les langues et avec les langues. Au Cameroun par exemple, nous avons plusieurs langues, quelle est la place des langues africaines ou des langues camerounaises dans cette diplomatie ? Puisque la diplomatie cest l’habileté de négociation pour arriver à un accord. Comment la situation multilingue du Cameroun est prise en compte dans cette diplomatie ? Nous avons voulu ne pas laisser le mot diplomatie dans le cadre des relations bilatérales entre les États, mais ma compréhension de la diplomatie est comme une ruse dans le langage de négociation, même en famille pour ce qui est des langues parce qu’on peut avoir des mariages exogamiques, c’est-à-dire la femme et l’homme ne partagent pas la même langue, cependant les enfants sont en contexte multilingue, il y a plusieurs langues dans la famille. On doit avoir une négociation pour que ces enfants arrivent à leur fin, c’est c’est-à-dire maîtriser les deux langues des parents avant les deux langues officielles que nous avons en partage. Or la diplomatie c’est-à-dire la ruse, l’habilité de négociation doit commencer par là avant d’arriver au niveau étatique ».