Le samedi 07 juin 2025, il s’est tenu un autre café littéraire autour du roman TUBA B., celle qui possède la force, de l’auteure camerounaise Diane-Annie Tjomb. Ce texte de 180 pages réédité en mars 2025 et disponible sur Amazon et au Cameroun par le biais de l’auteure, Diane-Annie TJOMB, propose le parcours d’une petite villageoise pleine de rêves et d’ambitions qui est envoyée à l’entrée de son adolescence dans un mariage, par un père qui a pour seul objectif de finir la construction de sa maison avec l’argent à percevoir de la dot. Plutôt surprenante par sa détermination et son éveil, Minga, la petite fille, va s’échapper de son mariage pour se retrouver à Douala, une métropole inconnue où elle va faire des rencontres aussi bouleversantes que troublantes.
Dès 12h00, alors que le ciel s’assombrit sur la ville de Yaoundé, La Maison des Savoirs, bibliothèque aux plus de vingt ans d’activités, voit s’installer dans son enceinte au Dépôt de Sable à Etoudi, les uns après les autres, les membres du club de lecture 15 Pages Par Jour, un club de lecture initié par ACOLITT (Association de Consulting Littéraire). Prévue pour deux heures, il faudra une heure supplémentaire à la rencontre pour faire le tour de la question des femmes soulevée par ce roman qui, au bout de l’après-midi, aura obtenu une note de 9,5/10 par les membres du club.
Un thème engagé auprès des femmes
L’idée du thème ETRE UNE FEMME ASSUMEE est directement puisée de la position qu’occupe la gent féminine dans une société qui lui demande d’être active, productive et en même temps soumise aux exigences du foyer ou de sa place auprès de l’homme. Quatre profils vont alors ressortir de ces 180 pages : Régine, la mère de Tuba, qui a été mariée très tôt et a fini par l’accepter ; Maman Régine, la veuve stérile que Tuba va rencontrer à son arrivée à Douala ; Madame Laroche, une femme fortunée dont le mari est d’une libido incontrôlable ; et Tuba elle-même, l’adolescente qui veut devenir ingénieur, la jeune épouse qui n’abdique pas face à un mari trois fois plus âgé et qui la presse de se donner à lui, l’étudiante brillante et assidue seule femme parmi les hommes dans son domaine, puis la mère célibataire en quête de travail dans une Afrique qui ne lui est pas hospitalière quand elle y revient. Ce que représente la femme qui entreprend se révèle sous une coloration nouvelle à travers la plume de Diane-Annie TJOMB, originaire comme Tuba de Bengbis.
Une rencontre littéraire assumée
Introduite par l’analyste littéraire Ray NDEBI, encore connu comme The Ghost, la rencontre a débuté par un exercice où chacun des 11 participants a joué un des personnages ou une des émotions du roman. Par exemple, Manuela s’est mise dans la peau de la petite Minga (Tuba) face au mariage, pour partager avec les autres le ressenti et les appréhensions d’une petite fille confrontée au mariage ; Raphaël qui nous a offert le regard de M. Laroche pour les jeunes femmes qu’il convoite.
Durant les trois heures, parfois marquées par des prises de positions fortes à l’image de Laura, élève en classe de terminale, et Célestine, enseignante, qui trouvent que les femmes fortunées ou diplômées perdent très souvent la notion de respect, ou de Raphaël qui soutient que les hommes comme M. Laroche ne devraient bénéficier d’aucune clémence puisqu’ils abusent de leur rang et de leur pouvoir, les échanges ont vu le livre se disséquer pour intégrer la plume et la pensée de l’auteure.
TUBA B., celle qui possède la force, roman dont l’auteure clame qu’elle n’est pas féministe, ouvre de nombreuses pistes menant vers la reconnaissance de la nécessité d’avoir des femmes libres et respectées dans leur détermination, pour construire une société juste et équilibrée. L’une des positions ayant soulevé le plus de questions est celle de la mère de Tuba, puisqu’il est apparu évident à un moment, qu’aucune émancipation de la femme n’est vraiment envisageable sans les moyens de sa volonté. Célestine, Stéphane et Pamela ont trouvé qu’une femme, même sans argent, est assumée quand elle remplit son rôle sans compromettre sa dignité, même si elle a vécu toute sa vie dans un mariage forcé ; avoir « fini par aimer son mari » comme elle le dit à sa fille dans le roman est, à leurs yeux, le premier signe qu’elle assume sa condition dans son contexte. Ce qui n’a pas toujours été l’avis de Marie-Thérèse, Ornela ou Erine qui ont relevé qu’il faut bien plus de considération de la part de la société en général. Pauline ONGONO et Ray NDÉBI, promoteurs de ce club de lecture en tant que fondateurs d’ACOLITTt, ont rappelé la question de l’éducation, un fondement qui doit être égal pour les deux genres ; l’observation de la société a démontré que les femmes sont préparées à servir et les hommes à ordonner.
Vers des pistes humaines
TUBA B., celle qui possède la force a même été noté à 9,5/10 par Stéphane qui trouve que c’est un roman à faire lire à toutes les institutions et personnes qui œuvrent pour la valorisation de la femme et la promotion de ses droits. Et aussi à toutes les familles et tous les éducateurs.
Le roman fait éclater les valeurs de la femme en quatre personnages afin de mieux en étudier la substance. La patience, la détermination, l’indépendance, l’entrepreneuriat. Une autre question, propre à susciter un peu plus d’humanisme, est soulevée : Les hommes, et si c’était vous les dominés ? Dans ce roman, les participants ont aussi relevé des hommes affaiblis et soumis à la force de caractère des femmes ; des échecs rencontrés par les frères de Tuba sur lesquels tous les espoirs reposaient…
Les hommes, comme Marie-Thérèse l’a exprimé, et comme le redoute Raphaël,, sont en train de perdre de leur influence. Partout, la montée en puissance des femmes est observée et ne semble pas faiblir. Est-il temps pour que les hommes commencent à leur tour à se battre pour leurs droits ?
Le 15 Pages par Jour du 07 juin 2025 s’est terminé avec en prime un don de livres de BELLA Célestine, son recueil de poésie intitulé »Ecoute ! », qui sera à l’honneur le 05 juillet prochain.
Pauline Ongono
ACOLITT