Cinq ans déjà que le Docteur Thierry Ngosso met à contribution son sens du devoir bien fait et son exceptionnelle capacité de mobilisation pour des échanges scientifiques fructueux. Sous sa conduite bienveillante, les membres du Laboratoire d’Ethicslab se dévouent à la tâche pour animer chaque année des séminaires de formation visant à réformer l’éthique et les politiques publiques appliquées à différents secteurs de la vie sociale : la santé, l’administration et l’éducation etc. L’édition 2024 s’avère être un grand rendez-vous où le savoir entend rendre justice à son devoir fondamental d’instruire les hommes et de les former à plus d’humanité en décolonisant la pensée éthique en faveur d’une justice épistémique. Crée en 2019 alors que le Covid-19 pesait dramatiquement sur l’humanité en imposant sa loi mortifère à tous les pays du monde, le Laboratoire d’Ethique s’est progressivement frayé un bon et rassurant espace dans le consortium éminemment élitiste des grands laboratoires scientifiques à travers le monde. En comptant un si grand nombre de chercheurs venus du Canada, des États-Unis, de l’Europe, de l’Afrique, de l’Asie et même de l’Australie cette rencontre fait du Cameroun et particulièrement de l’Université catholique d’Afrique centrale un point de visibilité scientifique internationalement remarquable. Cet honneur mérite d’être salué et cela à un double titre, d’une part cette initiative permet à l’université catholique d’Afrique centrale d’implémenter la nouvelle orientation de la constitution apostolique Veritatis gaudium qui donne mission aux universités catholiques de devenir « un laboratoire providentiel où l’Évangile et la culture se rencontrent pour se pencher sur les grands défis existentiels des hommes et des femmes de notre temps ». D’autre part en fédérant leurs intelligences dans un réseau de réflexions autour de l’épineuse question de la justice au service d’une Afrique assoiffée de justice et dont la décolonisation est un processus irréversible, les chercheurs contribuent de manière significative à donner corps à la première mission de l’Université catholique d’Afrique centrale : être au service de la vérité et de la justice.
Prof. Rev. Bienvenu Thomas Tchoungui
Recteur de l’Université catholique d’Afrique centrale
« Cette conférence organisée à l’occasion du cinquième anniversaire du Laboratoire d’Ethique qui a pour mission de réfléchir sur les questions d’éthique publique afin d’accompagner l’Afrique dans les mutations culturelles et sociales dont nous faisons l’expérience aujourd’hui, vise justement à réfléchir sur une thématique qui semble assez compliquée mais au fond la décolonisation des savoirs éthiques et la justice épistémique met en évidence une problématique. La science est considérablement devenue idéologique, en devenant idéologique n’y accède pas tout le monde. Hors il y a des savoirs endogènes, c’est à dire des connaissances traditionnelles que les gens ont eues par exemple en matière de gynécologie, en matière de médecine ordinaire ou phytosanitaire et ses connaissances ont été disqualifiées parce que n’ayant pas obéi au protocole universel de la connaissance et adoubées par les universités qui donnent les diplômes. Au nom de cette approche et du positivisme qui a donné un pouvoir immense à la science beaucoup de zones de l’humanité ont été exclues. Les femmes ont été exclues, il n’y a pas beaucoup de prix Nobel etc. Cette dimension élitiste du savoir est dénoncée aujourd’hui pour faire prendre conscience à tous ceux qui possèdent des savoirs et des capacités et aussi leur donner la possibilité de pouvoir se réapproprier ces savoirs et de les multiplier pour favoriser une meilleure émergence Africaine ».
Docteur Thierry Ngosso
« Cette conférence vise à célébrer une idée un idéal, c’est de réduire les inégalités académiques dans notre domaine de philosophie politique et morale et contribuer aussi à la justice épistémique. Le thème de cette conférence est justement « la justice épistémique », comment faire en sorte que nous soyons des personnes égales lorsqu’il s’agit de l’échange et de la production et même de la distribution des savoirs ? Beaucoup de chercheurs africains dans le domaine de l’éthique ou de la théorie politique de manière générale sont encore marginalisés sur l’chéquier mondial, mais il y a aussi une forme d’automarginalisation. Comme le disait la conférencière, il n’y a pas de circulation des saveurs entre Africains et parfois les obstacles sur notre chemin viennent des questions linguistiques, nous ne parlons pas les mêmes langues. Cela freine aussi cette production il y a un point très important qu’a évoqué la conférencière et auteur de cet enjeu de justice épistémique, c’est la dévalorisation des savoirs locaux. Le fait qu’ils soient marginalisés et mis à l’écart des savoirs respectables et qui dit respectable dit celui qui détermine qu’on a droit au respect, il faut dans ce processus de justice épistémique, ce que centre de recherche essaie de faire, s’extraire de cette aliénation. Valoriser son complaisance mais aussi sans intimidation sans honte ce qui fait partie de nos savoirs autochtones au quotidien ».
E.M