La cérémonie tenue au Centre Jean XIII de Mvolyé a été une occasion de retrouvaille entre laïcs engagés, universitaires, prêtres, curieux et amis de Baba Claude. Les échanges, les remarques, les encouragements, la lecture d’un extrait du récit, la dédicace et le verre de l’amitié ont meublé ce bel après-midi du 17 mars 2022. Durant deux heures, l’auteur Baba Claude était accompagné du révérend professeur Nicodème Alagbada en qualité de Directeur des Editions Editions Clé Yaoundé, du professeur Atenga Thomas pour la note de lecture et du cinéaste Thierry Ntamack qui a eu l’amabilité de présenter le livre sous la forme d’un récit adaptable au cinéma.
Le carrefour de la joie n’est pas un lieu géographique, c’est une allégorie pour parler du commerce du sexe. Dans le cas d’espèce, il s’agissait d’un apostolat, c’est à dire une œuvre d’évangélisation qui se veut originale. Inspiré par son père spirituel, Guy Gilbert préfacier l’ouvrage, l’auteur a fait 20 ans de rue pour essayer de comprendre les causes profondes du phénomène, et voir dans quelle mesure, l’église peut aider ces personnes. Entre 1990 et 2010 il conduit avec sa communauté un ministère auprès des filles victimes ou actrices de la prostitution dans les grandes villes du Cameroun. Il y vit une expérience exceptionnelle de l’amour et de la tendresse de Dieu, en communiant aussi à la croix du Christ au contact de ces filles tenues captives par l’ennemi. Baba Claude a été confronté aux forces de la nuit, aux puissances néfastes, à la violence de ces principautés négatives qui œuvrent à maintenir les pauvres captifs. Il a pu constater comment l’Esprit de Dieu transforme le monde quand nous lui prêtons nos âmes.
Cet ouvrage est alors un témoignage réel à la face du monde de la puissance de l’amour vrai, l’amour de Dieu et des hommes, de la beauté de la vie quand Dieu y prend sa place. Une démarche qui s’inscrit en droite ligne avec les exhortations du Pape François, qui selon l’auteur, insiste sur la notion de « l’Eglise en sortie », il precise « nous ne devons pas en tant qu’église rester dans nos bâtiments et paroisses, attendre que les gens viennent, il faut aller vers les lieux où les gens sont en souffrance. Le Pape utilise à cet effet une image intéressante, il considère que l’église est maintenant comme un hôpital de campagne après la bataille et l’important c’est de soigner les blessées et non d’endoctriner les gens, les blessés ont besoin de nous à leur côtés ». Dans la même veine, l’auteur pense que le problème de la prostitution est très mal posé par la société qui demeure hypocrite sur ce plan. La prostitution est un mal essentiel de la société. Baba Claude justifie cette assertion par une anecdote de l’ouvrage qu’il a vécu, « les filles de rue quelque part ont décidé de faire une grève, pas de sexe durant une semaine, la personne du gouvernement qui veille sur ce genre de chose l’a signalé lors de son discours à l’assemblée nationale, presque tous les députés ont mis la pression pour dire, ah non tout sauf ça ».
Une manière subtile de faire comprendre au lecteur que la prostitution n’est pas quelque chose à prendre à la légère, il faut la regarder de près. La plupart de ces filles sont des cœurs d’Or qui se retrouvent dans la boue, mais il faut avoir du courage pour fouiller dans la boue et y retirer les pépites.
Gabriel Claude Bayemi n’a que 22 ans lorsqu’il fonde la Communauté missionnaire de Cana en 1982. Il est alors étudiant en maths physiques à l’Université de Yaoundé. Il vient de faire la connaissance de deux prêtres camerounais qui vont réorienter sa trajectoire spirituelle. Il s’agit du père jésuite Meinrad Hebga, célèbre prêtre camerounais réputé pour ses séances d’exorcisme et de prières de délivrances et du père Jean Marc Ela, prêtre du diocèse d’Ebolowa (sud), grand théologien africain et écrivain prolifique mort en exil au Canada. Influencé par la pensée de ces deux prêtres, Gabriel Claude Bayemi lance un nouveau type de congrégation missionnaire, mixte et charismatique qui portera le nom de Communauté missionnaire de Cana. Elle est membre de l’association pontificale Catholic Fraternity, dont Gabriel Claude Bayemi est le délégué pour l’Afrique francophone. En 2006, elle est reconnue comme une association privée de fidèles par le diocèse de Yaoundé.
E.M