La salle de spectacle du ministère de la Communication s’est parée de solennité pour accueillir la cérémonie de dédicace de La larme du petit oiseau, œuvre de Raïssa Eloundou Mengada, en service à l’Observatoire des médias et de l’opinion publique. Sous le regard attentif du recteur de l’Université de Yaoundé II et du directeur de l’ESSTIC, les invités ont plongé dans l’univers singulier de ce roman, dont le souffle littéraire résonne comme une mélodie intemporelle.
Le titre, à la fois évocateur et délicat, dévoile une sensibilité rare. Loin d’être une simple perle de tristesse, la larme du petit oiseau traduit des émotions multiples, une douleur silencieuse où se mêlent espoir et résilience. Par cette métaphore subtile, l’auteure éclaire le destin d’Anna, figure centrale du récit, dont l’existence, façonnée par les épreuves, s’élève en un hommage vibrant à la mémoire maternelle. De page en page, ce roman se construit comme une fresque intime où chaque mot inscrit un souvenir indélébile.
D’une densité remarquable, La larme du petit oiseau se déploie en trois tomes équilibrés, totalisant près de 600 pages. Dès la première de couverture, le lecteur devine la richesse du parcours d’Anna : une jeune fille en prière, une femme en robe de mariée, une enfant sur un vélo… Autant d’images qui jalonnent un itinéraire marqué par l’éveil, la perte et la quête d’un avenir. La symbolique de la larme traverse le récit, tour à tour éclat de mélancolie, murmure de douleur ou reflet d’un espoir tenace.
L’intrigue, ancrée dans les années 1950 à 1970, se déploie entre la Sanaga Maritime, Douala et Akono. Sur fond de tensions historiques, le destin d’Anna se dessine dans un monde en mutation. Devenue orpheline après la disparition prématurée de sa mère, elle quitte son village avec sa fratrie, confrontée aux affres du colonialisme et aux bouleversements de la guerre d’indépendance. Le récit, empreint d’une tension dramatique, suit les pas de cette jeune fille dont l’innocence se heurte aux tumultes d’une époque incertaine.
À travers cette fresque romanesque, Raïssa Eloundou Mengada explore des thématiques universelles : l’amour et la famille, la jeunesse et la vieillesse, l’exil et la pauvreté, la mémoire et l’identité. Le roman, en écho aux débats sur la post-colonialité, interroge aussi la condition des orphelins et le rôle des femmes dans une société en quête de renouveau. Ce dialogue entre l’intime et le collectif confère à l’ouvrage une portée intemporelle, faisant de chaque page un écho aux défis du présent.
Alliant la rigueur historique à la puissance de la fiction, l’auteure tisse un récit où le vivre-ensemble et le multiculturalisme apparaissent comme des piliers essentiels. Son écriture limpide, parsemée d’expressions en langue locale, ancre le texte dans une authenticité vibrante, offrant au lecteur une immersion profonde au cœur des réalités camerounaises.
La larme du petit oiseau s’impose ainsi comme une œuvre majeure, témoin d’un pan méconnu de l’histoire nationale. Par sa richesse thématique et son intensité narrative, ce roman ne se contente pas de raconter une destinée : il éclaire une époque, ravive des mémoires et ouvre la voie à une possible adaptation cinématographique, tant il résonne avec les âmes et les cœurs d’aujourd’hui.
Raïssa Eloundou Mengada, auteure du livre
Lecture des extraits par Dr Evelyne Mengue A Koung
Note de lecture par Dr Emmanuel Atangana
Pr François Marc Modzom, Directeur de l’ESSTIC