À la Fondation Muna, les murs ont prêté l’oreille à une parole grave. Dans l’ombre des colonnes solennelles, superviseurs régionaux, délégués des institutions judiciaires, représentants du Secrétariat d’État à la défense et responsables de la Sûreté nationale ont répondu à l’appel. Tous réunis pour une même urgence : sonder l’état de santé du Barreau, pris au piège d’une époque troublée.
À l’origine de cette démarche, une alerte posée par le Conseil de l’Ordre : le quotidien des praticiens du droit s’effrite. Les conditions d’exercice se dégradent à vue d’œil, dans un silence parfois complice. Le Barreau, pourtant bastion de résistance face aux turbulences, subit aujourd’hui les secousses d’un malaise profond, à l’image des autres professions fragilisées par les mutations sociales et économiques du pays.
L’initiative se veut donc méthodique : une enquête de terrain, menée par des pairs, viendra collecter les réalités vécues dans chaque recoin du territoire. Des fiches soigneusement conçues accompagneront ces visites, pour capter l’essence de ce que vivent les avocats sur leurs lieux d’activité. L’intention n’est pas seulement de recenser, mais d’élaborer une stratégie de redressement, lucide et durable, en phase avec les douleurs exprimées.
Les premiers retours révèlent des plaies anciennes : manque de formation continue, précarité rampante, invisibilité sociale, absence de textes clairs sur les rémunérations, fracture numérique. Autant de blessures qui s’additionnent et fragilisent l’édifice. Il ne s’agit plus de panser à la hâte ni de colmater les brèches à coups de demi-mesures. Il faut repenser, refonder, rendre possible une renaissance.
Débutée le 2 mai dans toutes les régions, la campagne d’investigation suit son cours avec rigueur. Une fois l’analyse achevée, les résultats seront rendus publics le 31 mai 2022. Ce jour-là, les mots recueillis deviendront un miroir tendu au Barreau, révélant sa vérité nue. Une étape décisive pour lui redonner souffle, force et espérance.