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Justice à l’épreuve de l’éthique : la CONAC et le Barreau du Cameroun unissent leurs forces contre la corruption

En scellant un partenariat inédit, la Commission nationale anticorruption et le Barreau du Cameroun entendent opposer une réponse concertée à un mal qui fragilise la confiance dans l’institution judiciaire. Derrière la solennité de la signature, se dessine la volonté de réconcilier la justice avec sa promesse d’équité.

La Commission nationale anticorruption (CONAC) et le Barreau du Cameroun ont officialisé la signature d’une convention de partenariat visant à renforcer la lutte contre la corruption dans le système judiciaire. Cet acte consacre l’aboutissement d’un projet amorcé en août 2024, mûri dans le silence des concertations et porté par une ambition commune : mettre en commun les moyens, les expertises et les leviers d’action pour faire reculer un phénomène qui altère le rapport des citoyens à la justice.


Cette convergence institutionnelle s’inscrit dans un contexte marqué par la persistance des dénonciations de pratiques corruptives, régulièrement consignées dans les rapports annuels de la CONAC sur l’état de la lutte contre la corruption au Cameroun. Les signalements émanant des usagers de la justice, impliquant certains avocats aux côtés d’autres acteurs du système judiciaire, révèlent une réalité préoccupante, où l’idéal de probité se heurte aux failles humaines et structurelles de l’appareil judiciaire.
Conscient de ces enjeux, le Barreau du Cameroun a engagé, dès janvier 2023, une dynamique interne avec la création de commissions anticorruption auprès de chaque cour d’appel. Chargées d’identifier et de signaler les cas impliquant des avocats, ces structures traduisent une volonté d’auto-régulation et de vigilance éthique, rappelant que la défense du droit ne saurait prospérer dans l’ombre du compromis et du silence.


La nécessité d’une action plus large a été soulignée au sommet de la hiérarchie judiciaire. Lors de l’audience solennelle de rentrée de la Cour suprême, le 22 février 2024, son premier président a dressé un tableau sans complaisance du rôle de la justice dans la consolidation de l’État de droit. Il a rappelé que, malgré les efforts consentis, l’institution judiciaire demeure au cœur des préoccupations des citoyens, des entreprises et des investisseurs, souvent mise en cause dans les évaluations internationales qui pointent ses insuffisances comme un frein au développement économique.


Cette défiance, a-t-il averti, nourrit des dérives dangereuses : la résurgence de la justice privée ou populaire, où s’imposent la loi du talion et la raison du plus fort. Une pente glissante, symptomatique d’un malaise profond, qui fragilise le pacte social et menace l’équilibre même de l’État de droit.
Les déclarations du ministre d’État, ministre de la Justice, garde des sceaux, sont venues donner corps à ces inquiétudes. Le 21 juin 2024, devant le Parlement, il a révélé que 865 magistrats sur 1 584 en poste faisaient l’objet de procédures d’enquête disciplinaire à l’Inspection générale des services de son département. Un constat sévère, qui a renforcé l’appel à une diversification des partenariats et des outils de coopération de la CONAC pour combattre plus efficacement la corruption au sein du monde judiciaire.
Dans ce paysage traversé de doutes et d’attentes, la convention entre la CONAC et le Barreau du Cameroun se veut un point d’ancrage. Elle incarne l’espoir d’une justice qui se regarde sans détour, accepte ses fragilités et choisit, par l’alliance et la responsabilité partagée, de renouer avec sa vocation première : dire le droit avec droiture, et rendre à la confiance publique l’espace qui lui revient.

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